Ce que l’on disait de notre village…

Chatonnay, Chastenay, vg. de l’arr. de Lons-le-Saunier, canton , percept. et bur. de poste d’Arinthod; paroisse de la Boissière ; à 5 kil. de la Boissière, 6 d’Arinthod et 52 de Lons-le-Saunier.

Altitude : l1l16″. Il est limité au nord par Marigna, au sud par Dramelay et Arinthod, à l’est par Savigna et à l’ouest par la Boissière. Le moulin et la maison Battand font partie de la commune.

Son territoire est traversé par le chemin de gr. com. n° 52, d’Orgelet à Arinthod, par les chemins vicinaux tirant à Arinthod, à Marigna, à la Boissière, à Givria, à Dramelay, par la rivière de Valouze , le ruisseau de Valouson, par le bief de Givria et le ruisseau du Dard, qui forme une belle cascade près de Dramelay. Le village est agréablement situé, sur le revers oriental d’une montagne qui domine la Valouze, coulant à l’est. Il se divise en plusieurs quartiers appelés Quartier – Haut, Quartier-Bas , Quartier-Farachat, Quartier du Moulin et QuartierBringe.

Les maisons sont groupées, construites en pierres et couvertes en tuiles creuses, avec toits plats très saillants. Beaucoup d’entre elles ont un étage au-dessus du rez-de chaussée.

Pop. en 1790, 18h hab. ;en 1846, 180; en 1851 , 165, dont 79 hom.et 84 fem. ; pop. spécif. par kilom. carré , 60 hab. ; 59 maisons, savoir : dans le Quartier-Haut, 18 ; dans le Quartier-Bas, 8; dans le Quartier-Farachat, 12; dans le Quartier du Moulin, 5; et dans le Quartier-Bringe, 2 ; 40 ménages.

Les plus anciens registres de l’état civil remontent à 1686.

Les jeunes gens émigrent pour aller au service à Lyon. Cadastre exécuté en 1850 ; surf. territ., 272″ 56″, divisés en 1294 parcelles que possèdent 151 propriétaires, dont 91 forains ; surf. imp., 272″ 56°, savoir : 1h6o 06° en terres lab. , 68″ 50° en prés, 55o 56o en pâtures, 64″ en saussaies, 51* en jardins et 29″en friches, d’un rev. imp. de 5475 fr.; cont. dir. en princ. 1 105 fr. Le sol, d’une fertilité moyenne et craignant l’humidité, produit du blé, de l’orge, de l’avoine, du maïs, des légumes secs, peu de navette , des pommes de terre, peu de betteraves , du chanvre, du vin rouge de qualité médiocre, des fruits, du foin et des fourrages artificiels.

Le territoire de cette commune , depuis quelques années seulement, est périodiquement ravagé par les eaux, qui rouillent les prairies et entraînent les récoltes. On essaie la culture de la vigne , qui paraît réussir. Les récoltes suffisent en général à la consommation des habitants. On importe les 29 trentièmes du vin. On élève des bêtes à cornes, des chevaux, des mulets, des moutons, des chèvres et des volailles. On engraisse quelques cochons. 25 ruches d’abeilles. Le revenu réel des propriétés est de 5 pour cent. On trouve sur le territoire des tourbières, non exploitées, des sablières et des gravières abondantes.

La principale ressource des habitants consiste dans l’agriculture et dans la spéculation sur les moutons, qu’on mène paître pendant l’été sur les montagnes.

La population est en général indolente. Lorsque les récoltes sont mauvaises , elle mendie. Les aumônes qu’elle reçoit sont d’autant plus abondantes, que ses voisins la regardent comme sorcière. On craint qu’elle ne jette des sorts sur les personnes ou sur le bétail.

Biens communaux : une église, un cimetière à l’entour, et 49″ 76″ de pâtures et friches, d’un rev. cad. de 94 fr. 84 cent. Il n’y a point de maison commune ; les enfants fréquentent les écoles de la Boissière. Budget : recettes ord. 844 fr. ; dépenses ord. 844 fr.

NOTICE HISToRIQUE.

De tous les vestiges d’antiquités trouvés dans le bassin de la Valouze, les plus communs sont sans contredit les tombeaux. Ce qu’il y a de remarquable, c’est que tous se ressemblent. Ils sont construits en tuf et recouverts de laves qui s’appuient sur la maçonnerie. On n’y trouve que des corps et point de cendres , ce qui fait supposer qu’ils remontent au Iv° ou au v° siècle, à cette époque où les sujets de Rome succombaient sous les flots incessants des hordes barbares. Un tombeau de ce genre fut trouvé, il y a quelques années, dans le jardin de la cure de Chatonnay, et un autre, en 1796, à Monnetay, village qui n’en est pas éloigné.

Jusqu’au XII siècle, l’histoire reste silencieuse sur les localités qui environnent Arinthod , ou plutôt, les documents destinés à nous révéler leur existence , ont disparu dans le naufrage de 1795 , avec les titres de l’abbaye de Gigny M. Béchet a cru pouvoir traduire par Chatonnay le nom de Castanetum , qu’on rencontre dans une charte d’Albéric de Narbonne, en faveur de l’église de Mâcon, datée de l’an 950; mais cet historien s’est trompé, car ce titre explique positivement que le lieu de Castanetum est dans le diocèse de Lyon, tandis que Chatonnay a toujours fait partie du diocèse de Besançon. Du reste, l’église de Mâcon n’a jamais eu de droits dans ce village. Les largesses de Bernon en faveur du monastère de Gigny, qu’il avait fondé, permirent aux religieux d’accroître leur domaine. Ils reçurent, à titre de don , des souverains du pays, ou acquirent à prix d’argent, des seigneurs du voisinage, une large lisière de terrain attenant à leurs possessions primitives, qui embrassait toute la seigneurie de Valfin et celle de Chatonnay. On ne connaît point la date précise de ces acquisitions, mais elles paraissent remonter en général à la fin du xi° siêcle. On sait qu’à cette époque, les grands seigneurs, entraînés par l’éloquence de Pierre-l’Hermite, vendaient ou engageaient, non seulement leurs terres, mais encore leurs meubles, pour marcher à la croisade contre les infidèles. Les maisons religieuses restaient seules pour acquérir. La population agricole gagnait du reste à ce changement de maîtres. Elle était beaucoup plus heureuse sous le gouvernement pacifique des religieux, que sous celui de guerriers turbulents.

Le monastère de Gigny fonda une église à Chatonnay , dans le cours du XII siècle, et y envoya deux religieux, y compris le prieur, pour la desservir et percevoir les revenus de la terre.

Prieuré.

L’histoire particulière du prieuré, comme celle de la plupart des établissements monastiques secondaires, ne se compose guère que d’une suite de petits évènements intérieurs , dont le récit détaillé ne saurait procurer aujourd’hui ni profit , ni plaisir. Nous nous bornerons à signaler ceux qui se rattachent à l’histoire générale. Le 1″août 1251, Etienne, comte de Bourgogne, fit donation aux religieux de cent sols de rente, déclarant qu’il ne se réservait rien sur Chatonnay, si ce n’est la garde de l’église. Cette garde lui appartenait en vertu du traité d’association qu’il avait fait avec le prieuré de Gigny en 1191. Ce bénéfice fut possédé en commande dès l’an 1456, après le décès de Bouchard de Bonard. Quatre des titulaires, savoir : Jacques de Binand, en 1456; Jacques II, en 1481 ; Jean-Antoine de Binand , en 1616-1658; François-Gaspard de Joux, dit de Grammont, évêque d’Aréthuse, 1686-1727, appartenaient à la famille des de Binand, seigneurs de Chambéria et résidaient souvent à Chatonnay, pour être proche de leurs parents ; les autres prieurs, tels que Jacques de Praz, Renaud Vieux de Saint-Amour, en 1606; Claude Daleyne, du même lieu, en 1608, et ceux nommés par M. Gaspard, dans son Histoire de Gigny, n’y venaient que rarement ; des difficultés sur la question de savoir si le prieuré était rural ou conventuel, et si par conséquent la nomination des prieurs appartenait au pape ou aux religieux de Gigny; un incendie, arrivé vers 1619, qui détruisit tous les titres du prieuré; une double nomination en 1476, tels sont à peu près les seuls faits dignes d’être signalés. M. Antoine Jacquier, supérieur général de la congrégation de la mission, dernier prieur, s’étant démis de ce bénéfice en 1765, moyennant une pension viagère, ce prieuré fut sécularisé et uni à la mense de Gigny. Il fut loué 1000 fr. en 1780.

La maison prieurale, qui était située au-devant de l’église, a été démolie pour cause de vétusté dans le XVIII° siècle. Il ne reste que le puits. ,

Eglise.

L’église, autrefois prieurale et paroissiale, située sur une éminence au milieu du village, est dédiée à saint Maurice, patron de la commune, dont on célèbre la fête le 22 septembre. Elle se compose d’une nef , d’un chœur voûté en ogive, d’une chapelle et d’une sacristie. Elle ne se composait primitivement que d’un chœur. Une nef fut ajoutée par les habitants à une époque postérieure. La foudre étant tombée sur l’édifice en 1715 , les voûtes furent écrasées. On le rebâtit peu de temps après. Boisson de Dramelay y ajouta une chapelle , dédiée à sainte Barbe. L’église renferme quelques pierres tombales, avec inscriptions gothiques, un reliquaire contenant un fragment de la véritable couronne d’épines de Notre-Seigneur, un bas relief en bois bien exécuté et un tableau de saint Maurice, peint par Livet de Nantua, en 1744. Le prieur de Gigny avait le patronage de cette église, desservie d’abord par des religieux, puis, dès le xIn° siècle, par des vicaires amovibles, qui en 1686, prirent le titre de curés-vicaires perpétuels. Avant la construction du presbytère , qui eut lieu en 17li 6, les curés résidaient à Arinthod. Seigneurie. Le prieuré de Chatonnay était un fief relevant de la seigneurie d’Arinthod. Le prieur avait la justice haute, moyenne et basse sur Chatonnay, une partie de la Boissière et sur des meix épars à Dramelay-la-Ville, Soussonne, Genod, Ugna et Savigna. Il la faisait exercer par un juge châtelain, un procureur d’office, un scribe et plusieurs sergents. Le seigneur d’Arinthod soutint plusieurs fois être seul haut-justicier à Chatonnay, mais ses prétentions furent toujours repoussées. Les habitants devaient contribuer aux fortifications du château d’Arinthod et s’y retirer en cas d’éminent péril. Ils étaient soumis à la main-morte réelle et personnelle, à la taille, aux corvées, à la banalité du four et des moulins, à des cens en argent et en grains, aux droits de lods, de retenue et en un mot à tous ceux inhérents à la haute justice. Ils furent condamnés à l’amende, en 1404 , pour s’être permis d’élire des procureurs et des échevins, sans le consentement du prieur. Il parait qu’une amende de 5 sols suffisait alors pour étouffer une révolution communale. Une usine à fouler le drap et les moulins banaux, accensés en 14h4, furent vendus en 1588. Le signe patibulaire était dans la contrée dite aux Fourches.

Prévôté.

La prévôté fut inféodée à une famille noble qui prit le nom de ce village. Pierre de Chatenay donna, en 1266, à l’abbaye de SaintOyan , ses droits sur la dîme de Saint-Remy. André de Chatonnay était curé d’Aumont, en 1559.

Evènements divers.

Chatonnay, comme toutes les communes Voisines, eut cruellement à souffrir des courses des grandes compagnies au xIv° siècle. Jean de Chalon, seigneur d’Orgelet, devenu tout à coup furieux (1568-1569), se mit à la tête de ces brigands, et courut en armes les deux Bourgognes, pillant et brûlant tous les villages qu’il traversait. La noblesse du pays s’allia pour marcher contre lui. On vint assiéger son château d’Arinthod , repaire de ses vils compagnons. Le petit Méchin, vieux capitaine routier, fut pris près d’Orgelet. Les guerres de Louis XI, de Henri IV, de Louis XIII et la peste causèrent des ravages, là, comme à peu près partout. Dès incendies partiels, arrivés en 1810 et en 1856, ont détruit 15 maisons.

BIBLIOGRAPHIE.

  1. Gaspard, Histoire de Gigny. Archives de la préfecture du Jura
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