Le Valzinien du mois – Jean Troupel

 

Le Valzinien du mois –  Jean TROUPEL

                 Par notre équipe d’envoyés spéciaux à Fétigny Alain Laignel et Jean-Pierre Sonney

 

Alain Laignel:           Jean Troupel, bonjour. Notre appartenance à la même génération m’autorise à te demander la permission de te tutoyer? Alors allons-y.

            Et comme d’habitude je vais t’interroger sur tes origines. Ton patronyme sent bon le sapin de nos collines, pardon, Petites Montagnes. Donc tes racines sont plantées bien profond dans les rocailles de Fétigny?

 

Jean Troupel:            Pas du tout, tu te trompes. Si mon nom sentait quelques chose ça viendrait plutôt des montagnes de l’Aveyron! Je descends d’une famille qui vendait bois, café et charbon à Paris, ce qu’on appelait des bougnats, Troupel signifie «gardien de troupeau».

            Mais rassure-toi, je suis quand même Jurassien, né à Arinthod, en 1945, à coté, de ce qui n’était pas encore la salle Jeanne d’Arc, chez Madame Mermet. Et depuis j’ai peu bougé de Fétigny., sauf pour mes études de psychologie, avec un long séjour pour le travail à Dole. Ma grand-mère s’appelait Juilliard, et ma mère était une Paget. Lili était mon cousin germain.

AL:                 Tu as été malade de la polio, à l’adolescence, sans trop de séquelles. Et ensuite l’appel de la vocation? Tu as été instituteur pendant 12 ans.

 JTR:               Vocation n’est pas le mot, mais j’ai effectivement exercé ce beau métier, à Coisia, la Boissière, et aussi 6 ans à Legna, puis Arinthod.  Note de la rédaction: l’école de Legna, créée en 1830, et fermée en 2015, a été la dernière           école à classe unique du Jura.

JTR:               Puis, étudiant attardé, j’ai suivi une formation de psychologue, et j’ai exercé mes talents à Dole, pour finir à  Arinthod et à Orgelet.

            Cette formation a été une chance pour moi, car à l’époque les familles ne roulaient pas sur l’or. Nous étions paysans l’été, et comme beaucoup de nos concitoyens, pratiquions la tournerie l’hiver. Heureusement j’ai pu bénéficier d’études gratuites à l’Ecole Normale, et d’une bourse pour y entrer, c’était la carotte offerte pour attirer les pauvres ruraux!

            Notre fratrie comprenait 4 garçons. L’aîné Emile est le seul à avoir un peu tâté de la tournerie, puis il est devenu percepteur  et il a d’ailleurs obtenu la Médaille du Mérite. Le second, Michel,  a exercé la comptabilité. Le troisième, Claude,  était radicalement réfractaire à l’internat, inévitable dans nos régions pour suivre des études. Et enfin, moi le benjamin.

            A la sortie de l’Ecole Normale, j’ai été instituteur à Coisia en 67/68.

            Puis ce fut l’uniforme. Consigné en mai 68 j’ai regardé les événements de loin!

AL:                 Et venons-en à tes longues activité municipales. Toute une carrière!

 

JTR:               J’ai, comme on dit, «gardé la boîte» à Fétigny .pendant 43 ans. Il s’agissait en l’occurrence de l’urne utilisée pour les différentes consultations électorales, référendums, et autres événements consultatifs. Pendant les ¾ de cette période j’ai été adjoint, ce qui était, disons-le, confortable. Puis ensuite un mandat de Maire. Et ça c’est une autre paire de manches …

            Et je participe toujours aux associations d’anciens maires du Jura. 

 

AL:                  Et tu fais autorité en ce qui concerne le dossier des bois, toujours discuté (disputé?) entre Fétigny et Montadroit.

 

JTR:               En fait j’ai été confronté à ce gros litige lorsque j’ai été amené à en faire une synthèse dans le cadre du dossier, pour ne pas dire mémoire, que j’ai élaboré pour ma sortie de  l’Ecole Normale, à la grande satisfaction de mon professeur d’histoire !

Vous en trouverez les principaux éléments dans un article, aussi neutre que possible, que j’avais écrit pour le site Valzinenpetitemontagne.fr

Rappelons, pour les plus jeunes, que le bois, très abondant aujourd’hui dans notre région, était jusqu’à la Révolution de 1789 quasiment introuvable. Les forêts  étaient partagées entre les nobles et le clergé, et le peuple n’y avait quasiment pas droit. De plus «la coupe n’est que de petits buissons rabougris» (cf Colette Merlin dans «Le pain de mêlée»). A Présilly par exemple tout le bois était réservé aux Salines de Montmorot. Et ailleurs il était utilisé en priorité pour la récolte du salpêtre destiné aux canons du Roi!La situation ne s’est pas arrangée, suite aux différentes réorganisations communales.  Mais ne nous étendons pas sur le sujet, il y en aurait pour des semaines …

JPS:                A l’époque les relations entre communes étaient tendues, et les discussions épiques. Les choses se sont améliorées, je me fais juste un peu incendier quand je vais chercher des champignons à Ugna …

 

AL:                 Tu es toujours très actif au sein des Associations locales. Citons-en quelques-unes?

 

JT :                Les boules! Ah, les boules. Mais attention, la Boule Lyonnaise, celles des Seigneurs!

            Note de la Rédaction: seuls les néophytes, dont votre serviteur fait partie, peuvent encore             ignorer la différence entre la Lyonnaise, où le tir est précédé d’une petite course d’élan,         et         la pétanque, qui se joue à pieds tanqués, donc ancrés au sol. En revanche le vocabulaire        imagé reste à peu près le même, noms d’oiseaux et accents mis à part, et les        rafraîchissements, souvent anisés, sont en principe peu alcoolisés, car on évoque là un vrai sport. En principe.

            J’ai également la fierté d’avoir créé le Foyer Rural d’Arinthod., ce qui a demandé beaucoup d’énergie. A l’époque, comme partout, on participait surtout aux associations de chasse, pêche, etc. Et il y avait les clubs de foot et de Boule Lyonnaise. Mais les  jeunes avaient parfois un peu de mal à se faire accepter.

AL: Et quand on te croise avec une boussole dans la main, tu cherches quoi? Tu as perdu le Nord?

 JTR:  Je ne cherche pas, Monsieur, je randonne! Je pense avoir arpenté la plupart des sentiers de la région, et même au-delà. Ma légendaire compétence dans le rôle de serre-file lors de nos expéditions a d’ailleurs largement dépassé les frontières. Je n’ai jamais perdu personne! Mais moi je marchais déjà avant, de manière utile,  jamais sans but … ou sans quelque chose à glaner ou à grappiller.

   Et je balise … avec notre équipe nous balisons, c’est à dire que nous jalonnons les itinéraires pédestres pour indiquer, entre autres, les chemins officiels  à suivre, et les distances. Et nous avons aussi nos officieux… Mais attention ça ne se fait pas n’importe comment, il faut respecter les standards du Plan Départemental des Itinéraires de Promenade et de Randonnée et les normes nationales. Et on ne travaille qu’avec autorisation!

            Pour plus de détails voir l’article de Janine Buffet dans L’Echo de la Petite Montagne du 2ème trimestre 2021

 

JPS:                Jean est notre puits de sciences au sein du club de randonneurs. Il sait tout sur tout : les oiseaux, les herbes, les arbres, les monuments, les champignons.

 

AL:                 Toujours en contact avec la nature?     Et tu fais également référence pour le jardinage. Et tes tomates! Heu non parlons d’autre chose… Avec le climat dont vous jouissez à Fétigny c’est déjà un miracle d’en avoir eu 3 cette année. Bon d’accord, que 3, mais des grosses.

            Tu est un membre actif des Croqueurs de Pommes, où tu pratiques la taille, et d’originales greffes et boutures. Il te reste un peu de temps pour dormir?

JTR:               Je n’ai qu’un défaut, je suis extrêmement curieux. Et disons-le, je ne suis pas aussi compétent qu’on le raconte. Un peu de modestie, que diable…

            Je fais aussi un peu de sculpture sur bois à mes moments perdus. J’ai suivi les cours de l’Ecole de Moirans en ébénisterie. Tu veux voir? Je vais te montrer mon Pasteur. Je suis aussi sur un jeu d’échecs, symbolisant tous les continents.     

                                                          

Comme tu peux le voir je respecte le bois, et mets ses défauts en valeur plutôt que de les masquer. Tu as vu mon livre en bois? C’est mon enseigne. Ça me fait vraiment plaisir quand je vois des visiteurs essayer d’en tourner les pages 

            …  On visite un des ateliers …

            Cerise sur le gâteau! Jean nous montre quelques-unes de ses réalisations, et c’est vraiment superbe

 

AL:                 Quand je pense qu’on ne t’a pas demandé d’apporter  quelques-une des ces œuvres pour la manifestation du 23 Août! on a vraiment loupé quelque chose.  On va publier quelques photos avec cet article mais ça mérite vraiment une expo. 

 

JTR:               Mais tu me parles de la manifestation du 23 août? J’y étais! J’ai même remporté le concours de boules avec mon partenaire Denis Bride. Tous les talents je te dis!

            Et je donne un coup de main aux Outils d’Autrefois, qui ont obtenu un franc succès pendant les Journées du Patrimoine!

            Mais je n’endosse plus de responsabilités. J’ai 3/4 de siècle,  j’ai fait mon temps, place aux jeunes.

 

AL et JPS:     Merci Jean, on a un passé un moment très intéressant. Et on nous avait dit que tu étais bavard? Même pas vrai! Les autres m’avaient prévenu: « tu interviewes Jean? Apporte des sandwiches et un sac de couchage».  Je l’ai fait,  mais  c’était très exagéré. Un peu exagéré…

 

JTR:               Allez venez je vous paye l’apéro. Jean-Pierre ton MacVin? Alain?

Comment ça un Pastis? Ici on boit du Pontarlier Monsieur …

Alors un Pont …Sinon rien!

Merci messieurs, et faites-nous quelque chose de bien !

 

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